ys’air – 2023

“Respire !”

 

“Qui suis-je, d’où viens-je, ou vais-je ?”

 

“Comment t’appelles-tu ?”

 

“Quel est votre désir le plus profond, le souhait que vous voulez adresser au futur, pour vous, pour votre communauté, famille, tribu, vos amis …?”

 
 
Autant de questions posées aux passants de la place Yser, aux usagers de la voirie, aux riverains, aux résidents du Foyer Selah de l’Armée du Salut pour servir de base à la création de l’oeuvre.

L’œuvre d’art participative Ys’Air érigée sur la place de l’Yser a été inaugurée lors de la Semaine de la Mobilité et du traditionnel dimanche sans Voiture. Mis en œuvre par KANAL et l’asbl Patrimoine à roulettes dans le cadre de l’initiative Asphalt Art de Bloomberg Philanthropies et subsidiée partiellement par Bruxelles Mobilité, ce projet vise à transformer ce lieu névralgique de la capitale et lui donner une nouvelle dimension.

Au travers le langage morse peint à même le sol , soit des barres et des points, cette œuvre révèle un mot, une histoire, un passage, une envie d’ailleurs, un désir de lendemains meilleurs et les lie à un prénom. Un langage codé qui demande un effort pour comprendre, une attention particulière. Cette installation évoque aussi la place de la migration dans nos villes

L’œuvre ” Ys’Air ” orchestrée par le collectif artistique Patrimoine à roulettes a été imaginée collectivement avec l’association accompagnant le public fragilisé présent sur les lieux, le Foyer du Selah de l’Armée du Salut. Une façon pour ce public de s’exprimer et se réapproprier l’espace urbain au travers de l’art.

Le projet Ys’Air est l’un des 19 projets européens sélectionnés dans le cadre de l’initiative Asphalt Art Initiative de Bloomberg Philanthropies qui soutient des interventions artistiques dans l’espace public dans le but d’améliorer la sécurité, revitaliser les espaces publics et créer des espaces de rencontre.

« Ys’Air » , extraits du journal de chantier

« Enfin sur le pavé et le bitume.

Les trams et voitures défilent.

Les pompiers ne passent jamais inaperçus.

La mise au point du protocole de réalisation esthétique et matérielle se peaufine au contact de la place, des discutions entre plasticien, architecte… et des rencontres.

Cet après-midi, 16 personnes nous ont confiées leur désir le plus profond, les voeux qui les portent vers le futur.

La planète était au rendez-vous : Togo, Guinée Conakry, Syrie, Cameroun, Djibouti, Bruxelles, Maroc, Niger, Sénégal, Congo, France, Belgique, des femmes des hommes, le français, l’anglais et le gsm traducteur quand on ne s’en sort pas. La communication du sourire s’installe, le temps prends son temps, les récits de vies s’égrènent et les désirs s’expriment. et quels qu’ils soient, un point commun les lie : la soif d’humanité. J’ai été boulversé par les témoignages et malgré cela la capacité à rire et à continuer d’être animé dans le pari de l’humain. 

Ces prénoms et leur désir résumé en un mot seront traduit formellement dans la fresque sous la forme de l’alphabet morse, tels des traces, des passages, dont nous soupçonnons l’existence sans en connaître vraiment la nature.

L’organisation du chantier se met en place, les responsables du Foyer Selah de l’Armé du salut communiquent avec leurs résidents afin de les mobiliser pour témoigner et venir nous aider, le travail depuis le mois de juin avec eux porte ses fruits, la confiance est grande et installée. Thierry du comité de quartier est emballé par le projet.

Demain, c’est l’action, la peinture prendra doucement forme fin d’après-midi. »

« Plus de 30 degré à l’ombre, sur le bitume, cela fait combien ?

Le système pour peindre est trouvé, testé et approuvé. La première ligne de morse est apparue… bien seule encore mais demain une classe de 6ème primaire vient nous prêter main-forte ! Nous avons encore la nuit pour construire les gabarits en bois des « barres » et « points » en nombres afin d’accueillir nos volontaires de demain.

Il est de plus en plus facile de recueillir des témoignages (18 aujourd’hui), le nombre de curieux et curieuses augmente… les rencontres sont intenses, les personnes se racontent avec facilité, les désirs sont variés : devenir Ninja pour Igor (6 ans), que « tout le monde puisse vivre dans du vert » pour Yasin (53 ans dont 33 derrière les barreaux), faire enfin confiance aux jeunes selon Hassan (boulanger, 59 ans), …

Les merci « pour ce que vous faites”  abondent, les riverains sont content que quelque chose de positif se passe, la lassitude de ne parler ou faire écho qu’aux problèmes est formulée. Les trajectoires de vies s’entremêlent, les âges et origines aussi. Prendre le temps de s’arrêter pour « causer » et de sourire à l’idée de savoir que son nom et son désir fera partie d’une oeuvre d’art en devenir…

Les promesses de se revoir pour peindre commencent timidement.

Et nous avons hâte de rentrer dans le vif du sujet, notre objectif ? Récolter 100 témoignage pour recouvrir le sol.

Affaire à suivre. »

« 31 ° à l’ombre reste toujours aussi chaud pour les équipes le nez sur le bitume.

Sam, Catherine et moi accompagnés des bénévoles Kety (Géorgie), Mia (Belgique) et Collins (Cameroun) avons bu 2,5 litres d’eau chacune et chacun sans devoir aller au petit coin…

33 témoignages récoltés aujourd’hui, les 100 approchent à grand pas… Si vous voulez faire partie de l’oeuvre, envoyez-moi un message WhatsApp avec le mot qui résume votre désir le plus profond pour l’avenir. Ou venez peindre avec nous demain lors de votre pause déjeuner. Le mot peut être bien sûr dans votre langue natale.

Dimanche a été sous le signe des riverains et voisins qui passent et repassent en étant vraiment intrigués et enthousiastes du contenu et de l’existence de cette oeuvre.

Un nouveau désir est arrivé : kindvriendelijk ! van Peter (42 jaren oud). « Pureté » pour Hassan (14 ans, de 1080 Molenbeek) est aussi cité pour la première fois, ainsi que « Diversité »  pour Imran (16 ans de 1000 Bxl, du quartier) ou encore la « Beauté » pour Benjamin (43 ans, de Dijon habitant le quartier depuis 13 ans).

Le premier essai de table à palabres a été démonté, il ne fonctionnait pas. Bienvenue aux structures plus simples et basses. »

« Nous sommes passés entre les gouttes !

Le marteau-piqueur de Belgacom

Le sablage de Kanal

Les sirènes de police

Les klaxons furieux

… et les pompiers comme d’habitude.

Cela n’empêche pas l’oeuvre d’avancer.

Une équipe XXL aujourd’hui sur le terrain : Joseph et Collins (en attente de trouver un toit pour dormir), Olivia (en attente de déposer son mémoire en sociologie), 

Mia (en t’attente de reprise d’études), Kety (en attente de lancer ses ateliers de créations de stop motion dans le cadre de l’activation de l’œuvre – Bruxelles en vacances), Maëlle (en attente du bon cadrage, du bel instant),  Catherine et Marie (en attente de lire et écrire le morse les doigts dans le nez), Jean-Fred (en attente de finaliser le design de l’oeuvre), Sam (en attente de pouvoir terminer les assemblages) et moi (en attente de ne plus devoir me mettre à 4 pattes toute la journée – je n’ai plus 20 ans, chouette je ne serai pas sur le chantier les 2 jours qui viennent, place à la jeunesse).

Sans parler des personnes de passages qui désirent peindre 20, 30, 60 minutes avec nous.

Demain, 13 bénévoles de Bloomberg débarquent sur le chantier sur le coup de 13.30. Cela va chauffer !

Demain est le dernier jour de la pose de la couleur blanche et de la fabrication des tables/chaises à palabres.

Après-demain – jeudi prochain, les désires vont apparaître en lignes de morse parées de couleur…direction tout azimut. »

« Le soleil est toujours là !

Et nous aussi

Hier et aujourd’hui ont été placés sous le signe de la couleur. 

Ce vendredi , direction organisation matérielle de dimanche : un commerçant nous met à disposition une prise électrique, les dérogations pour circuler dans Bruxelles pour permettre d’acheminer le matériel pour le concert de Jean-Philippe sont dans la poche, le Foyer Selah sera bien présent dimanche, l’atelier Stop motion est préparé, le matériel est dans la camionnette, de m^me que les sirops 😉 .

Les lignes s’enchevêtrent de plus en plus. Le soutien des passants est toujours présent.

De son côté Jean-Philippe Collard-Neven prépare sont set musical de dimanche, il sera accompagné de très vieux claviers synthétiseurs dont il explore avec gourmandise les sons. Y-aura-t-il du morse dans on improvisation ? Affaire à suivre. »